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Les défis du fret maritime en conteneurs pour exporter

Changement de routing, transbordements ajoutés, conteneurs laissés à quai, congestions portuaires, nombreux mouvements sociaux, conditions climatiques extrêmes, coût du fret... Les chargeurs sont confrontés à de multiples difficultés.

Plusieurs défis se présentent pour renforcer la compétitivité des exportations françaises de produits agroalimentaires, notamment sur le fret maritime conteneurisé.

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À Haropa Port, qui regroupe les structures portuaires de Rouen, du Havre et de Paris, le secteur de l’agroalimentaire représente 25 % du trafic. En 2022, outre les marchandises transportées en vrac comme les céréales, le flux en conteneurs représentait 408 000 équivalent vingt pieds, ou EVP (1), avec une large diversité de produits (vins et alcool, produits laitiers, carnés, boulangerie, fruits et légumes, épicerie, alimentation animale…).

« Nous touchons 660 ports dans le monde, ce qui nous situe au seizième rang des ports mondiaux en termes de connectivité », indiquait Olivier Ferrand, directeur des flux et filières à Haropa Port, le 14 décembre 2023 lors de la journée Agrofret, organisée avec FranceAgriMer.

Déséquilibres

Pour se développer, le secteur est confronté à plusieurs enjeux. Il nécessite notamment des zones logistiques adaptées au type de marchandises, avec du "dry"(sec) et "reefer"(réfrigéré).

Par ailleurs, « le déséquilibre significatif entre l’exportation et l’importation de produits agroalimentaires (80 % contre 20 %) engendre une pénurie de conteneurs vides. Cela nous oblige à aller en chercher dans les ports qui sont excédentaires en matière d’importations, comme Anvers ou Rotterdam, entraînant des surcoûts », soulève Olivier Ferrand.

Pour le directeur des flux et filières à Haropa Port, ce déficit pourrait être en partie résorbé en captant des volumes de fruits exotiques importés de l’Amérique latine ou de l’Afrique. « C’est un marché énorme qui nous échappe, commente-t-il. Aujourd’hui, le marché français est approvisionné par les ports belges et néerlandais puis par camion. »

Décarbonation

Autre enjeu d’avenir : développer le recours aux modes massifiés (train, barge) pour acheminer les produits aux ports. « Le durcissement de la règlementation environnementale sur les émissions de CO2 du secteur du transport va se traduire par un surenchérissement progressif des coûts du transport routier, et donner un regain de compétitivité aux modes massifiés », anticipe Olivier Ferrand.

La décarbonation est « un grand défi du maritime », estime Florian Leleux, directeur général de la société de transport CMA CGM Agences France. Comme toutes les branches du transport, le secteur du fret maritime devra trouver des alternatives aux énergies fossiles. « Nous avons un énorme programme de recherche et de développement pour trouver la rupture technologique qui apportera des solutions », indique-t-il.

Géopolitique et environnement

À cela s’ajoute d’autres défis. « La géopolitique peut rapidement nous impacter, avec des problèmes opérationnels sur lesquels nous n’avons aucune maîtrise », poursuit Florian Leleux. Il donne l’exemple de la situation au Proche-Orient et des attaques de navires en mer Rouge par des rebelles houthis du Yémen. « Cela pose question sur l’utilisation du passage de Suez, ce qui pourrait avoir des répercussions sur les “transit time” (2) entre l’Asie et l’Europe », explique-t-il.

Florian Leleux évoque également des enjeux environnementaux. « On voit des restrictions d’eau sur le canal de Panama, autre lieu de passage très important, détaille-t-il. Il ne pleut pas assez, ce qui restreint le nombre des bateaux ou leur taille. Cela peut aussi impacter le transit time si on passe par le bas de l’Amérique du Sud pour éviter Panama. »

Gaspillage alimentaire

Changement de routing, transbordements ajoutés, conteneurs laissés à quai, congestions portuaires, nombreux mouvements sociaux, conditions climatiques extrêmes, coût du fret… Les chargeurs sont quant à eux confrontés à de multiples difficultés, comme en témoigne Nathalie Zoïs, directrice de la supply chain chez Lactalis. Le groupe exporte des produits à faible valeur ajoutée (lait, beurre, crème, fromage, lait en poudre…), dont 60 % en « reefer », donc frais, sur un marché très concurrentiel.

« Le “transit time” est très important pour nous, pour assurer la DLUO (date limite d’utilisation optimale) auprès de nos clients, explique-t-elle Or, le délai entre production et distribution des produits sur le marché atteint 100 jours, qui sont incompressibles. Il suffit que le “transit time” passe de 40 à 60 ou 80 jours, et les produits ne sont plus commercialisables. »

Il existe un enjeu fort sur le gaspillage alimentaire, ajoute Nathalie Zoïs. « Les pertes de produits sont de plus en plus importantes, constate-t-elle. Il suffit qu’un maillon de la supply chain ne joue pas son rôle, une grève, par exemple, où les produits sont bloqués dans les ports ou ne partent pas, et on ne peut plus les vendre. »

(1) Un EVP représente l’équivalent d’un conteneur.

(2) Temps passé sur un navire par un conteneur.

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